lundi 29 septembre 2014

L'ordinateur n'a pas toujours raison

Vous connaissez déjà l'histoire du XB-35 et YB-49, les ailes volantes de Jack Northrop, qui n'auront finalement aucun avenir au sein de l'US Air Force : Northrop va cependant engranger beaucoup de connaissances sur le comportement en vol d'un appareil en forme d'aile.

Le B-2 "Spirit", l'aile volante

A la fin des années 70, Northrop va ressortir son idée d'aile volante pour mettre au point un nouveau bombardier furtif pour l'USAF. Contrairement à ce que l'on a souvent affirmé, les équipes ne sont pas reparties des études du YB-49 car il valait mieux repartir de la planche à dessins, mais cela ne veut pas dire que certaines leçons apprises au cours du programme n'allait pas pouvoir être réutilisés pour le nouvel ATB ou "Advanced Technology Bomber".

Comme souvent, on s'aperçoit que les archives sont fragmentaires et certains documents sont perdus ou illisibles : l'équipe d'Irv Waaland, qui est en charge du nouveau projet, va donc aller interviewer les anciens managers du YB-49 comme William Sears ou Irv Ashkenas, mais surtout le premier pilote à avoir piloté le XB-35 : Max Stanley.

Max Stanley, pilote d'essai des XB-35 et XB-49


Stanley va même être engagé comme consultant et va recevoir une habilitation "Top Secret" pour participer au programme qui à l'époque est un programme "noir", c'est-à-dire dont même le nom et l'existence sont secrets. L'ancien pilote va ainsi participer à des vols en simulateur pour donner son ressenti sur le réalisme des simulations, mais aussi sur le comportement général de l'aile volante, économisant ainsi de nombreuses heures de calculs et de simulations. En une occasion, il va même sauver plusieurs milliers de dollars et de longs mois de développement !

Le YB-49, précurseur du B-2

Au début du programme, alors que la configuration de l'appareil commence à peine à être figée, les simulations montrent que l'effet de sol lors de l'atterrissage risque d'empêcher l'appareil de se poser : les ingénieurs commencent à se rendre compte qu'il va falloir créer une autre loi de pilotage sur les calculateurs de l'avion, qui ne sera active que lors de l'approche finale.

Lorsque Waaland pose la question à Stanley, ce dernier va répondre qu'il y avait des craintes similaires lors du lancement du XB-35, mais que au final l'appareil à toujours pu se poser sans encombres, même si les essais en soufflerie démontrent le contraire ! Comme les simulations qu'il fait montre un comportement similaire au XB-35/49 et que Stanley recommande de ne pas mettre de loi alternative, Waaland prend la décision risquée de ne pas croire les calculs et d'appliquer la recommandation de Stanley : pas de loi de pilotage alternative, le nouveau bombardier se posera donc normalement à l'issue de son premier vol !

Le B-2 va voler et surtout se poser sans aucun problème...

En juillet 1989, le nouveau bombardier, baptisé B-2 "Spirit", effectue son premier vol, et au moment de l'atterrissage, beaucoup retiennent leur souffle…l'appareil s'approche doucement…et se pose sans effort, exactement comme Stanley l'avait prédit ! Waaland avait choisi la bonne solution, l'ordinateur avait tord !

Moralité de cette petite histoire : l'ordinateur c'est bien, mais il ne faut jamais sous-estimer ce que peut apporter un pilote d'essai aux commandes d'un appareil !

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