lundi 20 octobre 2014

B-52 : la saga du BUFF (3/3)

Au début des années 80, les B-52 sont déjà en service depuis près de 25 ans...et pourtant aucun plan ne prévoit de les remplacer : ils seront même modernisés, grâce à un renouvellement de tous les calculateurs. Un ordinateur IBM AP-101 est monté à bord, comme sur le B-1B et la navette spatiale. Les plus vieux BUFF sont cependant retirés du service : en octobre 1983, le dernier B-52D arrive au "Boneyard" de Tucson, et marque la fin de la première génération des B-52 : à partir de cette date, il ne restera plus que les nouvelles générations en service, à savoir les B-52 "G" et "H"

Le B-52H, dernière version encore en service...


En 1989, le mur de Berlin va tomber, et l'Union Soviétique suivra peu de temps après : le B-52 va ainsi perdre sa mission première de dissuasion : le 27 septembre 1991, les derniers B-52 en alerte nucléaire sont mis au repos, et leurs armes démontées. Il n'y aura désormais plus de B-52 armés et prêts à décoller sur alerte, même si appareils et missiles nucléaires sont gardés en état pleinement opérationnel au cas ou…le B-52 restant disponible pour des missions conventionnelles si besoin, ce qui ne tardera pas à arriver, puisque le B-52 participera à la première Guerre du Golfe en 1991 : 74 des 90 B-52 "G" encore en service vont participer à cette campagne, effectuant près de 1740 sorties de combat depuis les bases de Diego Garcia dans l'océan indien ou de Moron AB en Espagne, voire directement de Barksdale AFB en Louisiane !

De nombreux BUFF seront ferraillés avec la fin de la Guerre Froide


Au début des années 90, avec l'entrée en vigueur des traités de désarmement, l'USAF va retirer les derniers B-52G, le dernier étant convoyés à Davis-Monthan le 5 mai 1994. A cette date, il ne restait plus que des B-52H en service. Tous les B-52G seront ensuite découpés à l'aide d'une immense guillotine en application des traités de désarmements. Coupés en cinq morceaux, à savoir les ailes découpées et le fuselage coupé en trois, la carcasse était ensuite exposé au milieu du Boneyard pour permettre aux satellites espions soviétiques de compter le nombre de bombardiers ainsi démantelés : pas moins de 365 bombardiers seront ainsi ferraillés !

La fin de la Guerre Froide donne lieu à des scènes surréalistes !


Il ne restera alors que le modèle "H" en service au sein de l'USAF, le seul encore en service à l'heure actuelle. Pourtant, le maintien en service du B-52 était loin d'être une évidence : avec le démantèlement du Startegic Air Command en 1992, et la fin des alertes nucléaires, il était possible de mettre le B-52 à la retraite…après tout, les bombardiers de nouvelle génération comme le B-1 "Lancer" ou le B-2 "Spirit" venaient d'entrer en service…mais il y avait un point sur lequel le B-52 ne pouvait pas être remplacé : sa versatilité et son faible coût d'exploitation ! Avec le retrait du B-52H, il ne reste plus que deux bases équipées de B-52, à savoir Barksdale AFB en Louisiane et Minot AFB dans le Dakota du nord, chaque base possédant environ 35 appareils.

Une force encore très crédible

Tout au long de leur carrière, les B-52 seront modernisés pour pouvoir lancer les armements les plus modernes de l'USAF et ainsi rester à la pointe de la technologie en première ligne. C'est ainsi que le missile "Hound Dog" sera rapidement remplacé par les missiles AGM-69 "SRAM", lui-même remplacé dans les années 80 par l'ALCM ou "Air Launched Cruise Missile". En 1991, l'USAF commencera également à retirer les canons des B-52H : remplacés par un carénage à l'arrière, le canonnier finira ainsi par disparaître du B-52, mais aussi de l'USAF qui était le dernier appareil à employer ce type de défense !

Dans le "rez de chaussé" du B-52 : plus rien à voir avec les années 60...


Le B-52 sera ainsi appelé une nouvelle fois en action en Irak pour le maintien des "no fly zone" en 1996 : ce sera la première utilisation du B-52H au combat. Ils seront de nouveau engagés en 1999 pour l'operation "Allied Force" au Kosovo et en Serbie. 8 B-52H basés à Fairford feront plusieurs missions de bombardement sur des objectifs militaires serbes. Malgré ces missions couronnées de succès, le plus gros engagement des B-52 sera la guerre contre le terrorisme à partir de 2001 : lancement de missiles de croisière, appui de feu pour les troupes le tout depuis la base de Diego Garcia dans l'océan Indien. A partir de 2003, le BUFF sera également engagé contre l'Irak : 28 B-52 seront mobilisés pour la campagne choc américaine depuis les bases de Fairford et Diego Garcia. Le B-52 aura d'ailleurs le meilleur taux de disponibilité des trois types de bombardiers mis en œuvre par l'USAF : plus de 80% contrairement au 53% des B1 voire 30% pour les B-2 !

En 2006, le B-52 marquera une autre première : il sera le premier jet militaire à voler avec du carburant synthétique, d'abord sur deux moteurs puis sur les 8 ! Les vols sont couronnés de succès ouvrant la voie à une utilisation plus large de biocarburant au sein de l'USAF, qui cherche à réduire par tous les moyens sa dépendance énergétique en pétrole.

La puissance américaine en action : le tapis de bombe...


En 2007, le BUFF sera équipé d'un pod de désignation laser, lui permettant de cibler ses propres objectifs avec des munitions guidées de précision de la gamme Paveway. C'est également en Août 2007 que le BUFF sera impliqué dans un incident de type "Bent Spear" qui aura de lourdes répercussions.

En janvier 2013, il ne restait que 78 B-52 en service sur les 744 qui ont été produits, et les appareils les plus anciens sont progressivement retirés du service quand il n'est plus économiquement possible de les maintenir en état, ceux qui restent utilisent récupèrent un maximum de pièces de ceux qui partent à la retraite.

Le B-52 testera avec succès les moteurs du futur C-5 Galaxy...mais ne bénéficiera pas d'une remotorisation


Malgré de nombreuses discussions, la remotorisation des B-52 par des RB211 a été envisagée mais n'est toujours pas à l'ordre du jour; cela permettrait pourtant de remplacer les huit TF33 par quatre moteurs beaucoup plus puissants et moins gourmands. Le BUFF a pourtant déjà été utilisé avec succès pour tester les moteurs du C-5 "Galaxy", prouvant que le remplacement de deux moteurs par un seul était faisable…mais remotoriser toute la flotte coûte cher, et l'USAF ne veut pas forcément faire trop de dépenses pour maintenir les B-52 en l'air face aux coûts exorbitants d'autres programmes comme le F-35 par exemple; le coût avancé par Boeing de 2,5 milliards de dollars (36 millions de dollars par appareil environ) ne semble pourtant pas si élevé que cela !

Après pas loin de 60 ans de service, le B-52 n'est toujours pas proche de la retraite : l'USAF espère garder ses B-52 jusqu'en 2040 au moins ! Dans cette optique, Boeing à déjà reçu un contrat pour modifier les éjecteurs rotatifs de bombes pour qu'il puissent acceuillir des munitions intelligentes qui pour l'instant ne peuvent être portées que sur les pylônes d'ailes. Si aujourd'hui trois bombardiers peuvent transporter 36 bombes intelligentes, grâce à cette modification, deux bombardiers pourront en emporter 40 !

L'accident sera causé par la stupidité du pilote, il y aura 4 tués tous à bord de l'appareil

Le B-52 connaitra de nombreux accidents tout au long de sa carrière : certains accidents eurent une publicité mondiale comme les accidents de "Chrome Dome", dont celui de janvier 1968 qui mit fin aux vols avec armes nucléaires à bord, d'autres lors de missions d'entrainement ne firent pas grand bruit. Plusieurs crash cependant furent causés par des problèmes techniques, comme des conduites de carburant gelées ou l'arrachement de la dérive arrière. De nombreux accidents sur B-52 furent provoqués par les conditions même de l'emploi de ce bombardier sur lequel reposait la dissuasion américaine : volant par tous les temps, effectuant de nombreux ravitaillement en vol ou encore les fameux "MITO", Minimum Intervall Takeoff, où les appareils décollent en séquence, un toute les 15 secondes etc… On peut ainsi signaler un accident d'un B-52G le 16 décembre 1982 : au cours d'un exercice "MITO", le B-52 de tête décolle "à sec", c'est-à-dire sans utiliser l'injection d'eau, alors que le 57-6482 qui est juste derrière utilise son injection d'eau, et il commence à rattraper l'appareil de devant. Le pilote s'en rend compte et va ramener les gaz à plus faible puissance. La réduction des gaz couplées aux gaz chaud de l'avion de devant fait que quatre des huit moteurs s'arrêtent, et l'appareil décroche avant de s'écraser en bout de piste, les neuf membres d'équipage sont tués. Un autre crash très spectaculaire aura lieu le 24 juin 1994 : au cours d'un show aérien sur la base de Fairchild AFB, le pilote, qui était connu pour son attitude agressive et dangereuse, dépasse les limites de sécurité et va faire décrocher l'appareil dans un virage serré : l'appareil s'écrase au sol dans une énorme boule de feu à quelques centaines de mètres des familles des pilotes qui regardaient le spectacle. La vidéo de l'accident fera le tour du monde.

Des accidents souvent dramatiques...


La longévité du BUFF est remarquable : imaginez que de la mise en service du B-17 à celle du B-52, il ne s'est écoulé que 17 années, ce qui signifie qu'un jeune mécano ayant commencé sur le B-17 à pu finir sa carrière sur B-52 : imaginez le changement ! Cela signifie aussi que les premiers pilotes de B-52 sont à la retraite depuis longtemps, et avec une date de retrait estimée à 2040, il est possible que les derniers pilotes de B-52 sont encore en maternelle à l'heure actuelle ! Le B-52 aura ainsi marqué le XXème siècle et il continue encore de symboliser la puissance américaine de part le monde, plus de 60 ans après sa mise en service !

Un équipage de BUFF en action au cours d'un entrainement...

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