Eject ! On distingue en bas de la photo le rail du siège (solidaire de l'avion), et le déploiement du parachute pilote en haut de l'image. |
Tout d'abord, au niveau de la sécurité, le siège éjectable est un élément pyrotechnique sensible au même titre que les bombes. Il faut donc protéger le système pour être sûr qu'il ne puisse pas s'activer par accident. Plusieurs accidents spectaculaires ont permis de renforcer la sécurité du système au fil des ans. Au départ il n'y avait aucune protection, et ce jusqu'à ce qu'un malheureux technicien accroche une des poignées d'éjection par erreur, éjectant le siège et lui-même dans un hangar. Malgré un toit en tôle ondulée, il fut tué instantanément. On a donc ensuite décidé de mettre en place des goupilles de sécurité. L'idée est simple : on met en place des goupilles qui empêche mécaniquement de mettre à feu la cartouche d'explosifs. Elles doivent impérativement être retirées avant le vol pour que le siège fonctionne. Suite à leur mise en place, il y eu un crash fatal, le pilote ayant tiré sur la poignée d'éjection, le siège n'était pas parti : une des goupilles était restée en place. On a donc par la suite mis les fameuses flammes orange "REMOVE BEFORE FLIGHT" sur toutes les goupilles.
Aujourd'hui,
le technicien qui aide le pilote à s'attacher doit enlever les
goupilles une fois le pilote prêt à partir. Il doit ensuite montrer au
pilote le nombre de goupilles retirées, et le pilote doit vérifier que
le compte est bon. Lors de l'atterrissage, le pilote ne doit pas se
détacher de son siège tant que le technicien n'a pas remis les sécurités
en place correctement.
Schéma d'un siège éjectable, ici un "ACES II" du F-18 "Hornet" |
En vol, le système s'active sur demande
du pilote, qui dispose de une ou deux poignées : une au dessus de l'appui-tête
et une seconde entre les jambes. Cette deuxième poignée est nécessaire,
car dans certains cas (vrille à plat) le pilote peut être plaqué contre
la planche de bord par la force centrifuge. Il devient alors difficile
voire impossible de tirer la poignée de l'appui-tête dans ces
conditions.
Une fois la poignée tirée, le mécanisme pyrotechnique
se déclenche. Dans un premier temps, il faut se débarrasser du "canopy"
(verrière) du pilote. Plusieurs méthodes existent. Soit la verrière
entière est larguée, des boulons explosifs permettent de la
désolidariser du reste de l'avion, et un piston actionné par une
cartouche de gaz permet de l'éjecter loin de l'avion. L'autre système
consiste à insérer du cordon détonnant (un fil très fin rempli
d'explosif) à l'intérieur de la verrière. Lorsque le pilote actionne sa
poignée d'éjection, le cordon détonnant est mis à feu, ce qui brise la
verrière en plusieurs grands morceaux, et permet au siège de passer à
travers sans problème.
Schéma du système de séparation du canopy du F-14 "Tomcat", montrant les boulons explosifs ainsi que les bouteilles d'azote sous pression qui permettent l'éjection du canopy. |
Cette deuxième solution est plus rapide,
mais présente des danger de coupures ou blessures au pilote. Elle a été
développée par Hawker Siddeley pour le Harrier, où tout incident près du
sol demande une évacuation immédiate. D'un autre côté, lorsque le
Canopy est éjecté, il faut s'assurer qu'il s'éloigne suffisamment pour
ne pas heurter le pilote. C'est notamment un souci dans le cas d'une
vrille à plat, où il n'y a pas de vent relatif pour l'éloigner. Vous
connaissez tous un cas de figure où c'est arrivé (mais si, vous savez :
la scène d'éjection dans Top-Gun ! Le pauvre Goose a été tué justement
parce que l'éjection a eu lieu lors d'une vrille à plat, et il est venu
frapper le canopy en s'éjectant )
Une fois la verrière larguée,
c'est au tour du siège de partir. Il faut d'abord sécuriser le pilote (1, voir le synoptique d'éjection plus bas dans cet article pour les références).
Pour cela les ceintures de son harnais se tendent au maximum, et des
cordons attachés aux jambes ramènent les pieds contre le siège, ce qui a
pour effet d'empêcher tout mouvement du pilote. Il faut en effet savoir
qu'une jambe qui n'est pas ramenée contre le siège a toute les chances
de rester dans le cockpit lors de l'éjection, ce qui n'est pas top pour
le pilote. Il ne faut pas non plus qu'il écarte les coudes en tirant la
poignée, sous peine de se briser les deux bras sur l'arceau du cockpit
lors de l'éjection, chose qui n'est pas agréable non plus...
Vue de l'arrière de l'"ACES II" avec le rail de guidage. |
Dans
les fractions de secondes qui suivent, toutes les liaisons ombilicales
reliant le siège et l'avion sont coupées, et les crochets qui arriment
le siège au plancher de l'avion s'ouvrent . A ce moment là, le seul
contact entre le siège et l'avion est le rail sur lequel est fixé le dos
du siège. Immédiatement après, les fusées sont mises à feu, ce qui fait
glisser le siège le long du rail (2), lui donnant la "bonne direction à
suivre". Lorsque le siège a parcouru les 2/3 du rails, un deuxième jeu
de fusées, plus puissantes, est mis à feu pour accélérer le siège
davantage. Le siège quitte le rail. Cela fait à peine 1/10 de seconde
que le mécanisme du siège s'est déclenché, et moins d'une seconde que le
pilote a tiré la poignée d'éjection.
Une fois que le siège a
dégagé le cockpit, un troisième moteur est mis à feu. Il a pour but
d'empêcher le siège de basculer "sur le dos" sous l'effet du vent. Un
parachute pilote (petit parachute de moins d'un mètre de diamètre se
déploie. Son but est de stabiliser le siège dans la descente (3) (et
remettre le pilote "pieds vers le plancher des vaches").
Une fois
que le siège commence à se stabiliser (4), un système coupe automatiquement
le harnais du pilote pour le libérer du siège (5). Cette sensation est très
désagréable pour le pilote, qui a soudain l'impression, en n'étant plus
retenu, que son parachute est parti avec le siège…pourtant il est
toujours dans son dos. Le pilote peut alors déployer son parachute (6), ou
attendre qu'il se déploie automatiquement grâce à un système
barométrique. Il ne reste plus à notre pauvre pilote qu'à attendre le
retour au sol en contemplant les restes de son appareil (7), qui va venir
percuter la planète qui n'avait rien demandé, partant en fumée ainsi que
les millions d'euros du contribuable qui n'avait rien demandé non
plus.
Synoptique de la séquence d'éjection du F-14 "Tomcat" |
On notera que sur les premiers modèles, le pilote devait
effectuer les deux actions séparément : d'abord larguer la verrière et
ensuite s'éjecter, ce qui demandait plus de temps. Pour les avions
biplaces, les deux pilotes devaient s'éjecter chacun de leur côté, alors
que sur les avions modernes, il suffit que l'un des deux actionne une
poignée pour déclencher l'éjection. Le pilote en place arrière est
éjecté en premier, suivi un quart de seconde plus tard par le pilote de
devant. De plus, chaque siège est mis en légère rotation d'un côté
(droite et gauche) pour réduire le risque de collisions entre les deux
sièges.
La version russe, avec une présentation du siège K-36. Comme on peut le voir, pas mal de points communs, mais aussi beaucoup de différences !
En plus, tous les pilotes ayant eu la vie sauve grâce à
un siège "Martin-Baker" sont admis au sein d'un des clubs les plus
fermés de la planète, l'"Ejection tie club", qui comme son nom l'indique
ne compte parmi ses membres que des hommes et des femmes ayant eu un
jour à s'éjecter d'un avion en perdition avec un siège de la marque. Les
"survivants" reçoivent ainsi une cravate et un pin's exclusifs du club.
Il y a actuellement (en 2012) plus de 7400 membres !
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