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lundi 16 juin 2014

Le C-141 "Starlifter" (1/2)

Pendant plus de 40 années, il a sillonné les cieux du monde entier : il a ramené les prisonniers de Guerre du vietnam, transporté des milliers de soldats au front, sans oublier d'en ramener un nombre impressionnant dans des hôpitaux. Il a ravitaillé toutes les bases américaines les plus difficiles d'accès sur les six continents…pourtant peu de gens aujourd'hui connaissent son nom : il s'agit du C-141 "Starlifter". Premier avion de transport militaire équipé de turboréacteurs, il a fait passer l'USAF dans l'ère du transport de masse.

L'histoire de cet appareil qui est resté la cheville ouvrière de l'USAF pendant quatre décennies commence à la fin des années 50.

Il a silloné les cieux pendant plus de 40 ans pour l'oncle Sam : le C-141 "Starlifter"
En 1958, le général William Tunner est nommé commandant du MATS, le Military Air Transport Service, c'est-à-dire la branche transport militaire de l'US Air Force. Un grand débat faisait rage à cette époque : faut-il oui ou non remplacer les avions de transports lourds comme le C-124 "Globemaster" ou le C-133 "Cargomaster" par des avions plus gros et équipés de réacteurs ? Pour beaucoup la réponse est non : en cas de crise, l'USAF peut compter sur la coopération des compagnies civiles qui disposent d'une flotte d'avions de transport de passagers modernes et confortables, sans oublier des flottes d'avions cargo : le MATS n'a donc besoin que d'une flotte réduite d'appareils pour les besoins de temps de paix, mais c'est tout.

Le général Tunner ne voit pas les choses de cet œil : il est convaincu que les appareils civils ne sont pas adaptés au transport militaire : ils sont conçus pour opérer depuis de  larges pistes d'aéroport civils, avec des moyens de maintenance et  de manutention lourds. Turner est convaincu que ce qu'il faut à l'Air Force c'est un camion rustique, capable de se poser sur des terrains non préparés, même sur la glace si il le faut, avec des rampes de chargement utilisables facilement sans aucun moyen extérieur : un C-124 "Globemaster" amélioré, bénéficiant d'une motorisation à réacteurs lui donnant ainsi une capacité d'emports et une distance franchissable dont ne disposait aucun appareil à l'époque.

La lettre de Lockheed pour son offre de ce qui allait devenir le C-141


C'est ainsi que l'USAF émet une fiche programme pour un appareil à ailes haute et plancher bas capable de transporter 35 tonnes de fret sur 10 000 kilomètres en se posant sur une piste en terre. Le programme avance à pas de fourmis : il n'y a pas de budget, le besoin semblant "superflu" par beaucoup, dont le congrès qui ne veut pas financer de nouvel appareil. Le cri d'alarme des militaires sur la faiblesse des moyens de transport lourds sera cependant entendu par un homme, et pas n'importe lequel : John Kennedy, nouvellement élu prend le problème à bras le corps, et annonce son intention de moderniser la flotte du MATS.

Un appareil résolument moderne

Le 1er juillet 1960, une résolution est votée au congrès, qui donne 310 millions de dollars à l'USAF pour la création d'un nouvel appareil de transport lourd. Les choses bougent enfin pour remplacer la flotte du MATS ! L'appel d'offre est lancé aux industriels dès le 21 décembre 1960. Douglas, Convair, Boeing et Lockheed vont faire des offres. Après analyse des propositions, le président Kennedy annonce le vainqueur le 13 mars 1961 : Lockheed, avec un appareil quadrimoteurs à ailes hautes et en flèche pour un prix de 4 millions de dollars par appareils. L'annonce est une surprise car traditionnellement c'est Douglas qui fournissait l'USAF en avion de transport…mais leur proposition est plus conventionnelle et offre moins de performances.

Le "Starlifter" prend forme petit à petit

Le nouvel appareil reçoit la dénomination de C-141, et sera baptisé le "Starlifter". Lockheed se lance alors dans le processus de développement, et va alors prendre une décision inhabituelle pour l'époque : il demande à faire certifier son noivel appareil à la fois par les autorités militaires et civiles, ouvrant la voie à la vente d'une version civile du "Starlifter".

La production est lancé à Marietta en Géorgie, au sein de l'USAF Plant 6 (un atelier n'appartenant pas au constructeur mais à l'USAF). Pourtant de nombreux sous-ensembles ne sont pas fabriqués par Lockheed, mais par des sous-traitants : AVCO fabrique les ailes dans le Tennessee avant de les envoyer par voie ferrée à Marietta, General Dynamics fabrique l'empennage etc..

L'empennage est particulièrement haut, dégageant ainsi la soute pour le chargement

Le moteur utilisé sur le "Starlifter" n'est pas un moteur nouveau : il s'agit du TF-33, une version développée à la fois pour les B-52, les KC-135, les VC-137 et d'autres appareils encore. Montés sous les ailes dans des nacelles rappelant vaguement la disposition des 707, mais avec une aile beaucoup plus haute, l'appareil acquiert cette silhouette basse qui le caractérise vue de face.

On peut dire que l'appareil emprunte les ailes haute du 707, le plancher bas des C-130 avec les portes de soute en pétale du C-133 "Cargomaster" permettant de le charger "ras la gueule" et de pouvoir quand même fermer la soute. La dérive en "T" est une spécificité Lockheed qui permet d'éloigner le plan fixe horizontal du sol et diminue les chances de l'abîmer lors du chargement.

La soute est dégagée de tout obstacle...


Autre innovation, les "kits". Le C-141 a été conçu dès l'origine pour être modulable en fonction de sa mission à accomplir. Pas moins de 19 configurations seront demandés par l'Air Force, allant du cargo pur à l'évacuation médicale ou le transport de passager et même les vols VIP ! Chaque kit est configuré dans des conteneurs qui sont déployables sur les bases avancées, ce qui permet de changer la configuration d'un C-141 'à la demande', y compris sur un théâtre d'opérations : un appareil peut ainsi transporter du cargo sur une destination lointaine avant d'être configuré en hôpital volant pour le vol de retour, le tout en à peine quelques heures.

La soute en mode "parachutistes"


Le premier C-141, le 61-2775, sort des usines le 22 Août 1963. Pour la petite histoire, c'est le président Kennedy qui en appuyant sur un bouton depuis le bureau oval va déclencher par télécommande l'ouverture de la porte du hangar de Marietta ! Une première démonstration de chargement est faite ce jour là : à la fin de la cérémonie, les portes arrière s'ouvrent, et une file de 10 "jeeps" descendent de l'appareil ! Le C-141 a été développé selon le plan Cook and Craigie : le premier appareil est donc un exemplaire de série, il n'y aura pas de prototype. Ce premier appareil est officiellement accepté par l'USAF le 28 Août.

Le premier C-141A produit, aujourd'hui à la retraite !

Hélas, le président Kennedy ne verra jamais le "Starlifter" voler : il est assassiné le 22 novembre, et le premier vol intervient le 17 décembre de la même année. Pour préparer ce premier vol, les employés de Lockheed et les techniciens de maintenance de l'USAF ont du travailler de concert, 7 jours sur 7 en faisant les trois huit. Enfin le 17, Léo Sullivan peut faire décoller le premier C-141 "Starlifter" du sol, le jour même du 60ème anniversaire du premier vol des frères Wright ! Le  vol de 55 minutes se passe sans anomalie, même si le train n'est pas rentré par précaution.

Poste du mécanicien navigant, bien encombré !

Ce premier C-141 est peut-être un appareil de série, pourtant il passera sa vie comme  appareil de test tant chez Lockheed que l'USAF. Il est aujourd'hui exposé à l'Air Mobility Command Museum.  Lui et trois autres appareils passeront leur vie comme appareil d'essais et seront désignés NC-141A, ils ne seront jamais convertis en C-141B ou C.

Vue éclatée de l'appareil.


En attendant l'entrée en service de l'appareil, ce seront ces quatre appareils qui vont engranger tous les vols d'essais, aussi bien chez Lockheed en Géorgie qu'à Edwards au sein de l'USAF. Le C-141 numéro 7 partira également à Eglin en Floride au laboratoire McKinley pour des essais en températures extrêmes.

L'USAF réceptionne son premier "Starlifter" en Août 1963


Pour économiser du poids et du temps, l'USAF demande ne ne pas peindre les appareils, ce qui était courant à l'époque : ils sont donc livrés couleur aluminium avec juste les insignes règlementaires. Des problèmes de corrosion finiront par avoir raison de cette philosophie et les appareils seront peints !

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